Académie d’Alsace des Sciences, Lettres et Arts
    Académie d’Alsace   des Sciences, Lettres et Arts  

Propos pour un anniversaire

Par Jean-Louis Schmitt                 

 L’Académie des Sciences, Lettres et Arts d’Alsace : trois fois vingt ans de dynamisme, deux siècles et demi de tradition

 

 

L’Académie des Sciences, Lettres et Arts d’Alsace se définit dans ses statuts comme une Compagnie regroupant des poètes, des écrivains, des scientifiques, des chercheurs et des artistes dont les œuvres participent au prestige de l’Alsace, en tant que lieu de convergence des influences culturelles au cœur de l’Europe et carrefour traditionnel de communication et d’échanges.

Cette Compagnie s’inscrit dans la continuité de la Société de Lecture fondée à Colmar en 1760 par le poète et pédagogue Théophile Conrad Pfeffel, qui fut un véritable trait d’union vivant entre les Lumières françaises et le mouvement allemand de l’Aufklärung, puis à la suite de la Société d’Emulation du Haut-Rhin, structure d’initiative gouvernementale, érigée en 1801 à Colmar également.

Les vicissitudes de l’histoire ont mis ces premiers cénacles académiques locaux en sommeil, tout comme les créations surgies entretemps dans les deux autres pôles urbains régionaux, telles  l’Académie des Sciences et des Belles-Lettres de Strasbourg fondée en 1769, ou la Société pour la propagation du bon goût et des Belles-Lettres constituée à Mulhouse en 1775.

Les bouleversements politiques du XIXe siècle français, puis le rattachement de l’Alsace à l’Empire allemand durant près d’un demi-siècle, enfin les deux conflits mondiaux qui ont particulièrement éprouvé cette région, entravèrent à maintes reprises les conditions d’un retour durable à la sérénité intellectuelle, à la liberté créatrice et aux échanges culturels sans arrière-pensées, qui eussent permis la refondation d’une véritable académie provinciale.

Finalement, c’est encore et toujours à Colmar, métropole d’équilibre au centre de l’Alsace, ancienne capitale parlementaire de la province d’Ancien Régime en tant que siège du Conseil Souverain d’Alsace, que se produisit la résurgence tant attendue, avec la naissance le 25 mai  1952 de l’Académie d’Alsace. Après un peu plus d’un demi-siècle de rayonnement, la Compagnie choisira  de renouer avec le qualificatif traditionnel de « Sciences, Lettres et Arts ».

 

Couronnée par l’Institut de France, destinataire en 1958 d’une adresse du secrétaire perpétuel de l’Académie Française,  l’Académie des Sciences, Lettres et Arts d’Alsace a été reçue en 1998 au sein de la Conférence Nationale des Académies, et se voit aujourd’hui reconnue comme seule porteuse légitime de l’esprit et de la tradition académiques en terre d’Alsace.

C’est avec le sentiment du devoir accompli, mais aussi la tête pleine de projets, que ses membres peuvent célébrer aujourd’hui le soixantième anniversaire d’une Compagnie vivante et dynamique, qui chaque année : organise des séances publiques dans diverses villes d’Alsace avec des thèmes touchant à la culture, l’histoire, la littérature, l’architecture, le patrimoine, les sciences, l’économie, etc. ; remet de multiples prix couronnant les œuvres d’écrivains, de poètes, d’historiens et de chercheurs reconnus, mais distinguant aussi des jeunes talents dans les domaines artistique, scientifique et philosophique ;  publie « Les Annales », revue consignant ses travaux et citant les activités culturelles multiformes des membres de ses quatre sections : Belles-Lettres, Sciences de la Nature, Sciences de l’Homme, Art et artisanat d’art.

 

Précisément, dans la dernière livraison de ces Annales, qui vient de paraître avec le millésime 2012, Christiane Roederer retrace quelques grands moments de l’existence de la Compagnie, dont elle est le septième président après René Spaeth, Camille Schneider, Pierre Schmitt, Raymond Oberlé, Jean-Claude Gall, Bernard Pierrat. Elle y rappelle aussi, et l’on ne peut que reprendre avec délectation sa propre expression, que « quatre prix Nobel s’inscrivent aux cimaises de notre nef imaginaire » : Albert Schweitzer, prix Nobel de la Paix en 1952, Alfred Kastler, prix Nobel de Physique en 1966, Jean-Marie Lehn, prix Nobel de Chimie en 1987, Jules Hoffmann, prix Nobel de Médecine en 2011 -  et l’on relèvera au passage la diversité des pôles d’excellence qui ont été ainsi illustrés par des membres éminents de notre Académie.

Plus épisodiquement enfin, notre Compagnie édite un recueil d’études ou un film, organise des expositions d’œuvres d’artistes régionaux, coproduit des conférences avec les grandes écoles de la région (telle l’ENA) ainsi qu’avec les Universités de Strasbourg et de Haute Alsace, participe à des rencontres avec d’autres sociétés savantes ou aux travaux de la Conférence Nationale des Académies. Enfin, elle a développé des relations privilégiées, amicales et suivies avec les trois Académies voisines de Stanislas (Nancy), de Franche-Comté (Besançon) et de Metz.

Pour célébrer sa soixantième année de dynamisme et les deux siècles et demi de la tradition académique régionale à laquelle elle se rattache, notre Compagnie a choisi de se raccrocher à un autre anniversaire, celui du demi-millénaire d’une œuvre majeure de l’art mondial,  le retable peint par Grünewald pour la chapelle de la commanderie des Antonins d’Issenheim, et conservé aujourd’hui au musée Unterlinden de Colmar : une œuvre emblématique de la richesse et de la complexité de la civilisation rhénane dans laquelle elle a été conçue.

Tant il est vrai que l’Académie des Sciences, Lettres et Arts d’Alsace n’oublie jamais qu’elle se veut elle-même révélatrice de talents au cœur d’une région emblématique de l’Europe, qu’elle ambitionne de les fédérer au service de la collectivité, et d’être ce lieu de rencontre et d’humanisme qui serait à la fois l’honneur et la conscience de ce coin de terre.

 

Jean-Marie Schmitt
Vice-président de l’ASLAA

(Issenheim, 1er juillet 2012)

L'Edito

Traduire, c'est relier

 

Le Prix Maurice-Betz 2023 de traduction a été remis samedi 7 octobre à Colmar à Antonin Bechler, professeur de langue et littérature japonaises à l’Université de Strasbourg, traducteur du grand écrivain Kenzaburô Ôé, Prix Nobel de littérature en 1994.

 

Le Maire de Colmar, parrain et partenaire de la cérémonie, et le Consul général du Japon étaient présents. La manifestation prenait place dans le cadre du festival régional de traduction «D’une langue vers l’autre ».

En ces temps géopolitiquement troublés, il est important de valoriser la traduction. Car la traduction ouvre les horizons géographiques et culturels, elle relie les humains aux ancrages si différents, elle honore des figures universelles de la pensée et de la littérature. La traduction enrichit la polyphonie du monde.

 

Le Colmarien Maurice Betz (1898-1946, photo ci-dessus), écrivain et traducteur (de Rainer Maria Rilke, Thomas Mann, Friedrich Nietzsche), passeur entre les langues française et allemande en des périodes pourtant conflictuelles, est un symbole précieux pour notre région. Alors que le Goethe Institut a décidé de fermer son antenne strasbourgeoise, nous avons à veiller à l’ouverture rhénane et européenne de l’Alsace.

Le Prix Maurice-Betz de l’Académie d’Alsace existe depuis 1957 et a distingué des dizaines d’écrivains, poètes, traducteurs. Au-delà des remises de diplômes et des moments de convivialité qui les accompagnent, c’est un travail en profondeur qui s’accomplit, dans le meilleur des traditions humanistes d’ouverture et de rayonnement.

 

Bernard Reumaux
Président de l’Académie d’Alsace

 

Invitation à l’Agora du 19 novembre 2019

 

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